Du dimanche 20 au mardi 22 mars 2022, notre stagiaire Yassine, étudiant à l’ULB, a pris la route vers la Pologne à bord d’une camionnette chargée de dons en faveur des réfugié·e·s ukrainien·ne·s. A l’initiative de l’opération : Erik Van den Haute, professeur à la Faculté de Droit à l’ULB. Yassine et ses compagnons de route reviennent sur cette expérience humaine, riche en émotions.
Un départ sur un coup de tête
« J’ai pris ma décision la veille, samedi soir, après avoir reçu un message sur un groupe Whatsapp. Il manquait de chauffeur·e·s pour acheminer les nombreuses caisses de biens de première nécessité récoltées jusqu’en Pologne. » Yassine n’a pas hésité longtemps avant de s’embarquer dans le périple. « Ayant toujours eu un intérêt profond pour l’humanitaire et ayant d’ailleurs moi-même fondé mon association, je ne pouvais laisser passer cette occasion d’apporter mon soutien à un peuple qui fuit la guerre. »
« La plus authentique des aventures humaines »
Dimanche matin, 4h00. Rendez-vous devant le bâtiment Solvay pour le dispatching des chauffeur·e·s bénévoles et camionnettes. Parmi les 19 chauffeurs volontaires, 5 étudiant·e·s ULB. Yassine rencontre son binôme, Fred, photographe. D’ici une demi-heure, Les chauffeur·e·s démarreront pour 1300km et 14h de route. « Dans un autre contexte, c’est une logistique qui aurait pu paraître pénible. Le réveil, les nombreux kilomètres à parcourir…Mais on n’y pense même pas en fait. On est tou·te·s là pour aider et cela a créé un vrai lien entre nous.»
C’est en effet ce qui a également motivé Maxime, étudiant à l’ULB, à se proposer comme chauffeur bénévole. Maxime, 27 ans, a vu cette opportunité de voyage comme « une quête à la recherche du sentiment d’appartenance commune à une cause surpassant les intolérables limites de l’individualisme. »
« J’ai été immédiatement frappé par le sentiment de solidarité et de fraternité qui s’est dégagé d’un groupe au sein duquel pratiquement aucun membre n’entretenait de lien avec un autre. »
Un sentiment partagé par Yassine : « Les bénévoles venaient de tous horizons : âges différents, parcours différents, cultures différentes… Et au final, ça n’avait aucune importance. On était tou·t·e·s réuni·e·s autour d’une seule et même cause, autour de cette même humanité. »
Une guerre tangible
Pour Yassine, cette expérience lui a permis d’être confronté de manière concrète à ce qui se passe non loin de chez nous. « On a beau entendre parler de la guerre à la télé, à la radio, dans les journaux, sur les réseaux sociaux… Cela reste difficilement palpable. C’était autre chose une fois arrivés à Lubin, aux côtés de l’ONG polonaise chez qui nous avions un contact«
En effet, la ville frontalière est submergée par l’afflux de réfugiés ukrainiens parmi lesquels de très nombreux enfants. Erik, porteur du projet, nous explique : « Le travail de cette ONG est remarquable mais la demande est tellement importante qu’il n’est pas évident de faire face. Le contenu de trois camionnettes a été remis à cette ONG qui n’a pas manqué de nous rappeler à quel point c’était important pour eux. Nous avons vu les visages des bénévoles polonais et ukrainiens s’éclairer lorsqu’ils découvrirent l’ampleur de notre chargement, chose qui est impayable. »
Etre sur le terrain était quelque chose de très prenant et émouvant. « Comme découvrir un hall omnisports transformé en dortoir et une salle de jeux pour enfants improvisée par exemple » explique Yassine. « Nous entendions les récits glaçants des familles touchées par cette guerre. J’ai vu des réfugié·e·s pleurer dans les bras des bénévoles. J’en ai aussi vu porter des sourires émus et sincères. Toutes ces choses ne vous laissent de marbre. »
Après avoir quitté Lubin, l’équipe s’est rendu à la Gare de Varsovie. « Nous avons profité de l’après-midi pour nous rendre compte de la situation à la gare de Varsovie où nous avons participé également à une distribution de crêpes aux réfugié·e·s. C’était très intense émotionnellement »
Ensuite, les volontaires ont encore délivré le contenu des 7 autres camionnettes à Varsovie, où de nombreu·se·x bénévoles polonais·e·s ainsi que le maire local les attendaient pour prendre le relais. « Là aussi, nous avons eu l’impression que notre chargement était un véritable don du ciel car la situation est devenue très difficile en raison du nombre de plus en plus important de réfugié·e·s qui affluent » témoigne Erik. « Il semblerait que c’était la première fois qu’ils recevaient un chargement aussi volumineux »
« Je me suis pris une claque »
Cette expérience a été une « vraie claque » pour Yassine. « Cela a aussi été une grosse remise en question. Il y a eu tant de guerres, tant de réfugié·e·s ces dernières années. Je me suis demandé : ‘Pourquoi n’ai-je pas proposé mon aide par le passé ?’ On se sent peut-être plus concerné·e·s par la proximité de cette guerre en Ukraine mais des réfugié·e·s qui vivent cette situation, il y en a partout, et depuis un moment. Aujourd’hui, c’est elles et eux, demain, ça pourrait être nous. Je souhaiterais qu’on soit solidaire entre nous tout·e·s et ne pas attendre que les victimes de guerres soient proches ou nous ressemblent ! Il faut faire preuve d’humanité envers toute l’Humanité. » Pour Maxime, ils ont simplement agi « pour apporter en ce monde un soupçon de sens ».
« Les montagnes sont faites de petites pierres »
Marqué par ce voyage, Yassine souhaite aujourd’hui éveiller les consciences : « si vous voulez aider, n’attendez pas que quelqu’un le fasse à votre place. Ne soyez pas découragé·e·s par l’énergie supposée que cela pourrait vous prendre. Il ne faut pas spécialement faire partie d’une grosse organisation pour donner un peu de vous. Il ne faut pas non plus nécessairement prendre congé pour faire 2600km. Il y a aussi tant de choses à faire ici, en Belgique. »
Comme les petits ruisseaux font les grandes rivières, pour Yassine, « Les montagnes sont faites de petites pierres ». Il ne faut pas négliger les petites actions. « Aider, cela a quelque chose de vraiment satisfaisant. On se sent utile. Et ce n’est vraiment pas un sentiment négligeable. »
L’opération #ConvoiULBUkraine en quelques chiffres
- Plus de 100 bénévoles mobilisé·e·s
- 5 tonnes de biens collectés, triés et emballés en l’espace d’1 semaine
- 2 jours de tri
- 1650 étiquettes apposées sur les cartons : « childcare », « food », « flash lights », « medical equipment », « batteries », …
- 19 chauffeur·e·s mobilisé·e·s dans 10 camionnettes pour transporter 350 caisses
- 28h de route et 2600km parcourus
- 200 autres caisses envoyées en Pologne et en Roumanie par l’Ambassade d’Ukraine
L’opération #ConvoiULBUkraine en images
Plus de photos: @convoiulbukraine sur Instagram.
MERCI
- à tou·te·s pour les nombreux dons !
- aux nombreux·ses bénévoles de tous âges venu·e·s aider à trier, emballer et transporter tout ce matériel jusqu’en Pologne. Parmi elles et eux : Yassine, notre stagiaire, et Bastien, notre stUDEr
- aux bénévoles polonai·se·s qui ont collaboré sur place et au maire local pour l’accueil
- au bourgmestre Doulkeridis et à son équipe d’ouvriers communaux du service des transports pour l’acheminement via l’ambassade d’Ukraine.